L’industrie des crypto-monnaies s’apprête à vivre une période de transformation majeure en Europe avec l’introduction imminente de nouvelles réglementations européennes sur les actifs numériques, connues sous le nom de MiCA (Markets in Crypto-Assets). Et les premiers actifs à en faire les frais seront sans doute les stablecoins.
Parmi les nombreux acteurs du marché des stablecoins, l’USD Coin de Circle (USDC) pourrait bien être le principal bénéficiaire de ces nouvelles directives. Les implications de ces nouvelles régulations pour les stablecoins pourraient permettre à l’USDC de capturer une part de marché représentative par rapport à son principal concurrent, Tether (USDT), et de tirer ainsi son épingle du jeu.
Un sélection drastique sous forme d’exclusion
Les nouvelles règles européennes, qui entreront en vigueur en juillet 2024, visent à instaurer des standards de licence et de gouvernance stricts pour les émetteurs de stablecoins. D’ici 2025, les émetteurs de tokens référencés à des actifs et de tokens d’argent électronique devront obtenir une licence délivrée par une autorité financière nationale et se conformer à des exigences rigoureuses en matière de gouvernance d’entreprise, de gestion des conflits d’intérêts et de gestion des réserves. Ces mesures incluent notamment l’obligation de maintenir un tiers de tous les fonds dans une institution de crédit indépendante.
Anastasia Melachrinos, analyste chez Kaiko Research, a souligné que ces changements réglementaires pourraient permettre à USDC de capturer des parts de marché significatives face à Tether, en particulier à mesure que les traders utilisent les stablecoins pour déplacer des actifs numériques entre les plateformes d’échange ou pour stocker de la valeur en période de volatilité des prix des tokens.
L’influence de la réglementation MiCA se fait déjà sentir parmi les principales plateformes d’échange de crypto-monnaies. OKX, par exemple, a réduit le support de trading pour USDT dans l’Union européenne, bien que les utilisateurs puissent encore déposer, retirer et échanger des USDT contre des euros. De même, Kraken envisage de supprimer les paires de trading EUR/USDT dans le cadre de son plan de conformité avec les nouvelles directives.
La position des régulateurs européens, combinée aux mouvements des grandes plateformes d’échange, renforce donc la position de USDC comme une alternative conforme aux nouvelles régulations. En effet, le délisting de USDT par les plateformes majeures pourrait inciter de nombreux utilisateurs à se tourner vers USDC. Mais pas par choix, seulement par obligation et par dépit.
La pseudo bonne nouvelle c’est que, toujours selon les données de Kaiko Research, les volumes de trading des stablecoins adossés à l’euro ont connu une forte hausse depuis le début de l’année. Les stablecoins comme EURT de Tether, EURS de Stasis, EURCV de Société Générale et AEUR d’Anchored ont collectivement dépassé les 40 millions de dollars de volume de trading hebdomadaire depuis mars. Cette dynamique montre un intérêt croissant pour les stablecoins adossés à l’euro, bien que les stablecoins adossés au dollar dominent encore largement le marché global.
La bon karma de Jeremy Allaire, cofondateur et PDG de Circle
Connu pour être à l’avant-garde de la technologie crypto, le cofondateur et PDG de Circle a récemment exprimé son optimisme débordant quant à l’avenir de cette industrie en pleine mutation. Jeremy Allaire n’est pas un novice dans le domaine de la technologie. Avec plus de 35 ans d’expérience à observer les cycles d’adoption technologique, il a été témoin de l’évolution de l’internet depuis ses débuts. Allaire a fait ses premiers pas dans l’univers des cryptomonnaies à l’époque où le Bitcoin n’était encore qu’une curiosité pour la plupart des gens. Depuis, il a cofondé Circle, la société derrière l’USDC, le deuxième plus grand stablecoin par capitalisation boursière.
Dans un récent post sur X, Allaire a déclaré : « Je construis Circle depuis plus de 11 ans, et à aucun moment je n’ai été plus optimiste qu’en ce moment. » Pourquoi cet optimisme débordant ? Selon lui, la majorité des gens n’ont qu’une compréhension limitée de ce qui se passe réellement dans le monde de la crypto. Cette méconnaissance, paradoxalement, est une source de grande excitation pour Allaire, car elle signifie que le potentiel de découverte et d’innovation est immense.
Pour comprendre l’optimisme d’Allaire, il faut jeter un coup d’oeil en arrière. Il rappelle comment l’internet a transformé la société et l’économie au fil des décennies. Les réseaux ouverts, les protocoles ouverts et les logiciels libres ont été les moteurs de cette transformation. La contribution collective de la propriété intellectuelle ouverte à cette révolution continue de l’internet semble s’accélérer, et selon Allaire, la crypto est sur le point de propulser la société et l’économie vers l’avant de manière extraordinairement puissante.
Depuis son apparition il y a plus de dix ans, la crypto a parcouru un long chemin. Allaire souligne que la crypto a introduit une nouvelle couche de confiance pour l’internet. Le Bitcoin, par exemple, a ouvert la voie à une pléthore de techniciens brillants qui continuent d’innover dans cet espace. Les progrès techniques incluent l’évolution de l’infrastructure blockchain, la disponibilité des données, la sécurité et la confidentialité.
Allaire se projette sur les dix prochaines années avec un enthousiasme sans bornes. Il envisage des avancées significatives dans les contrats intelligents, les blockchains de quatrième génération, les organisations on-chain et les stablecoins. Selon lui, tout cela est réalisable au cours de la prochaine décennie. Le temps passe vite, mais lorsqu’on prend du recul et qu’on examine ce qui a été accompli, il est difficile de ne pas être extrêmement optimiste quant à l’avenir.
MiCA, aubaine ou catastrophe annoncée ?
La réglementation MiCA (Markets in Crypto-Assets) de l’Union Européenne vise à créer un cadre réglementaire clair et cohérent pour les actifs cryptographiques, y compris les stablecoins. Cependant, certaines critiques estiment que cette réglementation pourrait entraîner des effets négatifs, notamment une exclusion forcée de certains acteurs du marché, un rétrécissement du marché, et une diminution des libertés financières et individuelles.
MiCA impose des exigences bien trop strictes en matière de conformité, de transparence, de gouvernance et de capital. Les petites entreprises, startups et projets décentralisés pourraient avoir des difficultés à se conformer à ces exigences en raison de coûts élevés et de ressources limitées. Seuls les plus gros acteurs ayant les moyens financiers et administratifs pour répondre à ces normes pourront survivre, excluant ainsi les plus petits acteurs et réduisant la diversité du marché. Cela pourrait décourager l’innovation et limiter les nouvelles initiatives dans l’espace des stablecoins.
A cause de MiCA nous pourrions également assister à un rétrécissement du marché. Avec la mise en conformité nécessaire, les acteurs existants qui réussissent à se conformer pourraient dominer le marché, conduisant à une concentration accrue. Cela pourrait réduire la concurrence et la diversité des offres disponibles pour les consommateurs. Les petits projets et initiatives décentralisées risquant de disparaître, ce qui pourrait limiter les options disponibles pour les utilisateurs et concentrer le pouvoir entre les mains de quelques grandes entreprises.
La complexité et le coût de la conformité pourraient aussi décourager l’innovation. Les nouvelles idées et projets pourraient être abandonnés en raison des ressources nécessaires pour se conformer aux réglementations, limitant ainsi le développement de nouvelles solutions financières.
Et puis MiCA pourrait renforcer la centralisation du marché des stablecoins, diminuant ainsi la liberté financière et les libertés individuelles des citoyens de la zone EU. La centralisation va à l’encontre des principes d’autonomie financière qui sous-tendent les cryptomonnaies. Les utilisateurs pourraient perdre la capacité de choisir parmi une gamme diversifiée de produits financiers décentralisés, réduisant ainsi leur liberté de choix et d’usage de leurs actifs numériques.
Enfin, les exigences de transparence et de déclaration pourraient conduire à une surveillance accrue des transactions financières, compromettant la vie privée des utilisateurs. La collecte de données sur les transactions pourrait être perçue comme une intrusion dans la vie privée financière des individus, ce qui est contraire aux principes de liberté et d’autonomie souvent associés aux cryptomonnaies.
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