Le fondateur de l’échange de crypto-monnaies FTX, Sam Bankman-Fried, est aujourd’hui sous les feux de la rampe.
Sa comparution devant les tribunaux new-yorkais le mardi 3 octobre 2023 déclenche une avalanche de réactions et de spéculations. Alors que l’industrie crypto ainsi que les utilisateurs de la plateforme sont encore sous le choc de l’effondrement de FTX et d’Alameda Research, les propos de John Reed Stark viennent renforcer la position du parquet.
L’ accusé Sam Bankman-Fried a-t-il déjà perdu ?
John Reed Stark a partagé sur X un très long tweet où il partage les raisons, qui sont au nombre de trois, pour lesquelles SBF sera condamné selon lui.
- Il y a énormément d’acteurs prêts à témoigner dans cette affaire. Bien plus que ce que l’on voit habituellement.
- John J Ray III, le remplaçant de SBF, a mené une enquête très approfondie et compte bien tout partager.
- Le syndrome de Blabbermouth qu’il explique longuement dans sa publication.
https://x.com/JohnReedStark/status/1708836671813239215?s=20
Qui est John Reed Stark ?
Avant de s’intéresser aux détails de l’affaire, il est intéressant de comprendre le poids de l’analyse de John Reed Stark, un expert renommé en conformité réglementaire numérique. Avec plus de deux décennies d’expérience en cybersécurité, fintech et réglementation, son curriculum vitae est impressionnant.
Ancien de la Securities and Exchange Commission (SEC) et fondateur de son Office of Internet Enforcement, il a supervisé de nombreuses enquêtes sur les violations technologiques des titres.
Son expertise est telle qu’il a même enseigné le cyberdroit dans des universités prestigieuses comme Georgetown et Duke.
Les trois raisons principales d’une probable condamnation de Sam Bankman-Fried
Selon Stark, trois facteurs rendent la condamnation de Bankman-Fried très probable :
1. La coopération sans précédent d’initiés : Plusieurs cadres de haut niveau, proches de SBF, ont coopéré avec la justice. Notamment Caroline Ellison, dirigeante d’Alameda, qui était également la petite amie occasionnelle de SBF, ainsi que Gary Wang, co-fondateur de FTX, et Nishad Sing, directeur de l’ingénierie chez FTX. Tous ont plaidé coupables et collaborent avec le parquet, fournissant une carte détaillée des activités présumées criminelles de SBF.
Ellison a par ailleurs admis dans son journal divulgué publiquement qu’elle ne se sentait pas compétente pour diriger Alameda, le hedge fund crypto appartenant à SBF profondément lié à la fraude. Après avoir divulgué son journal aux médias, SBF a vu sa caution révoquée pour subornation de témoin.
En outre, deux autres témoins de l’accusation seront également entendus. Le premier témoin, Andria van der Merwe, est une économiste spécialisée dans les enquêtes réglementaires complexes sur les marchés financiers. Reconnue pour sa compétence en matière de régulation financière et de risques de marché, elle pourrait éclairer la potentielle conspiration de Bankman-Fried et de ses proches associés en enfreignant les lois fédérales sur les valeurs mobilières et les marchandises. De plus, elle pourrait expliquer comment la chute de FTX a influencé le secteur financier dans son ensemble.
Le second témoin, Peter Easton, un professeur de l’Université de Notre Dame est sur le point de présenter une analyse détaillée du cadre financier d’Alameda Research et de FTX. Les procureurs mentionnent que ses observations tourneront autour du bilan financier d’Alameda qui a déclenché la désintégration de l’immense empire crypto de Bankman-Fried. On s’attend à ce que le témoignage d’Easton aborde la gestion des actifs des clients et la concordance entre les soldes réels des comptes bancaires et les registres internes de FTX.
2. Accès inédit à des preuves accablantes : Stark signale l’effort colossal de John J. Ray III, l’actuel PDG de FTX. Ray a investi environ 200 millions de dollars pour enquêter sur les allégations d’activités illégales de SBF, fournissant potentiellement une quantité énorme de preuves à la police et aux autorités réglementaires.
Stark pense que Ray a probablement remis au gouvernement la plupart de ses conclusions, lui donnant accès à une montagne de preuves à charge contre SBF.
3. Une campagne de relations publiques contre-productive : Stark souligne l’importance pour les défendeurs de rester silencieux. Cependant, SBF a ignoré ce conseil, s’exprimant abondamment dans les médias, fournissant au parquet de nombreuses déclarations potentiellement utilisables contre lui.
« SBF a tout simplement refusé de se taire« , a écrit Stark. « La question de savoir si SBF est fou comme un renard ou ne peut pas contrôler son désir compulsif de mettre son âme à nu est un débat laissé non seulement aux experts juridiques, mais aussi aux experts psychologiques. »
Scandale FTX : une affaire complexe
Les événements précédant le procès dépeignent un tableau de transactions frauduleuses et de blanchiment d’argent ayant entraîné de graves dommages. Alameda Research aurait utilisé des dépôts de clients FTX pour investir dans des tokens fictifs. Suite à une perte de confiance, les deux entités ont subi d’énormes pertes, contribuant à un désenchantement général du secteur des crypto-monnaies.
L’enquête a mis à jour de nombreux crimes présumés, entraînant des inculpations de fraude et de blanchiment d’argent contre Bankman-Fried, avec d’autres charges potentiellement à venir. Plusieurs individus clés se sont entendus pour collaborer à l’enquête, ce qui semble renforcer la position du parquet.
Le plus grand cas de fraude de l’Histoire américaine ?
L’affaire Bankman-Fried pourrait bien être la prochaine grande saga judiciaire des États-Unis, et certains experts légaux n’hésitent pas à évoquer qu’elle pourrait représenter l’une des affaires de fraude les plus conséquentes de l’histoire du pays avec la disparition alarmante de 8,9 milliards de dollars appartenant à des clients et des investisseurs. Jusqu’à présent, des procédures de faillite ont permis de récupérer près de 7,3 milliards de dollars d’actifs liquides.
L’écho de cette affaire ne peut que nous rappeler le procès de Bernie Madoff, longtemps considéré comme la plus grande fraude de l’histoire récente des États-Unis. Mais l’implication de Bankman-Fried ne s’est pas limitée à l’univers financier. En effet, il s’est également distingué sur la scène politique américaine. En 2022, il a généreusement donné plus de 40 millions de dollars à des comités et candidats du Parti Démocrate. Plus surprenant encore, le livre à paraître de Michael Lewis révèle que l’ancien PDG de FTX aurait envisagé d’offrir 5 milliards de dollars à Donald Trump pour qu’il renonce à se présenter à la présidence américaine.
Face à la tourmente, Bankman-Fried continue de clamer son innocence. En août 2023, il a plaidé non coupable à toutes les accusations portées contre lui. L’affaire est à suivre de près, car elle pourrait bien redéfinir le visage des scandales financiers américains du 21ème siècle.
Verdict : un chemin tout tracé vers la condamnation ?
Les preuves contre Sam Bankman-Fried semblent solides.
Avec une armée de témoins et une avalanche de preuves, l’issue du procès semble pencher en défaveur du fondateur de FTX. Toutefois, la justice doit suivre son cours. Ce qui est certain, c’est que ce procès est bien parti pour rester dans les anales de la fraude financière et sera suivi de près par tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la crypto.
En relation : La BBC diffuse un documentaire sur l’affaire FTX et sur SBF : « Panorama, la chute du roi de la crypto »