Les ministres des finances de l’Union Européenne ont formellement adopté de nouvelles règles qui permettent aux autorités fiscales de partager des données sur les détenteurs de crypto-monnaies. Ces règles, qui seront bientôt publiées dans le Journal officiel de l’UE, forcent les entreprises de crypto-monnaies à fournir des informations sur les avoirs de leurs clients, informations qui seront partagées automatiquement entre les autorités fiscales.
De nouvelles règles de partage de données fiscales sur les cryptos formellement adoptées par l’UE
Ces règles, initialement proposées l’année dernière, ont reçu un soutien unanime des États membres de l’UE, bien que les discussions aient eu lieu, en grande partie à huis clos cependant. L’objectif principal de ces règles est d’empêcher que des actifs soient cachés à l’étranger grâce à l’utilisation de crypto-monnaies. En mai dernier, une copie du projet de loi obtenu par CoinDesk grâce aux lois sur la liberté d’information a révélé que les règles étendent une loi existante pour couvrir une large gamme d’actifs numériques, y compris les stablecoins, les jetons non fongibles (NFTs), les jetons de la finance décentralisée (DeFi) et les revenus issus du staking de crypto-monnaies.
La loi en question, connue sous le nom de Huitième Directive sur la Coopération Administrative (DAC8), oblige les entreprises de crypto-monnaies à fournir des informations sur les avoirs de leurs clients, qui seront automatiquement partagées entre les autorités fiscales. La Commission européenne, chargée de proposer de nouvelles lois au sein de l’UE, a déclaré que les dispositions relatives aux crypto-monnaies de la DAC8 complètent la récente réglementation sur les marchés des crypto-actifs (MiCA) et les règles de lutte contre le blanchiment d’argent en vertu du Règlement sur le transfert de fonds (TFR).
« La directive améliorera la capacité des États membres à détecter et à lutter contre la fraude fiscale, l’évasion fiscale et l’évitement fiscal, en exigeant que tous les fournisseurs de services liés aux crypto-actifs basés dans l’UE, quelle que soit leur taille, déclarent les transactions des clients résidant dans l’UE », a déclaré la Commission dans un communiqué mardi. Elle a ajouté que la portée des règles avait été élargie par rapport aux versions précédentes pour s’appliquer également aux institutions financières en ce qui concerne la monnaie électronique et les monnaies numériques des banques centrales (CBDC).
L’impact des réglementations de l’UE sur la vie privée
Selon un récent article paru sur Cointelegraph, les efforts réglementaires de l’UE mettraient en péril la vie privée des citoyens européen. Cela soulève la question suivante, dans quelle mesure la quête de la sécurité doit-elle compromettre la sacralité des données personnelles sans lesquelles il n’y a plus de vie privée et donc plus de libertés individuelles ?
Dans un monde où les crimes financiers et les cyber-menaces augmentent de manière exponentielle, les efforts pour sécuriser le paysage financier sont les biens venus. Cependant, l’Union européenne (UE) fait face à un dilemme critique avec l’introduction de multiples directives Anti-Blanchiment d’Argent (AML) et lois associées. Tandis que ces mesures visent à protéger le système financier, elles soulèvent des questions éthiques graves et génèrent des coûts parfois exorbitants pour les institutions financières et les consommateurs.
Évolution de la réglementation financière en Europe
L’UE a introduit plusieurs directives et lois qui ont façonné son cadre financier.
Parmi celles-ci :
- la Directive AML 5,
- MiCa
- et le Règlement sur le Transfert de Fonds se distinguent par leur portée et leur rigueur.
Ces lois requièrent des processus de due diligence complexes, obligeant les banques, les gestionnaires d’actifs crypto et même les clubs sportifs à vérifier l’identité de leurs clients, leurs actifs et leurs modèles de transaction.
La question de la Vie Privée
L’ampleur de ces réglementations est telle qu’elle commence à éroder le sanctuaire érigé par nos Pères autour de la protection des données personnelles. Avec des règles comme la règle de voyage du Groupe d’action financière (FATF) et les équivalents de la Loi sur les Pratiques de Corruption à l’Étranger, la collecte, le partage et la surveillance des données deviennent de plus en plus intrusifs. Ce n’est pas seulement une question de commodité ; il s’agit d’un changement fondamental dans le contrat social entre les citoyens et les institutions, menaçant la confidentialité financière et par conséquent les libertés individuelles.
Coûts et conséquences économiques
Les coûts induits par ces réglementations sont énormes. Les institutions financières doivent investir massivement dans les technologies et les processus, réduisant ainsi leur agilité dans un marché en constante évolution. De plus, ces coûts se répercutent sur les consommateurs, qui finissent par payer des frais plus élevés et ont accès à une gamme toujours plus limitée de produits financiers.
L’échec de la réglementation ?
Malgré la sévérité de ces règles, des ratés réglementaires de grande envergure continuent de se produire. Des institutions majeures comme HSBC, Danske Bank, et récemment FTX ont été associées à des controverses réglementaires et à des malversations.
Ce qui soulève une question inévitable : ces réglementations sont-elles vraiment efficaces, ou ne sont-elles que des gestes symboliques, gênant les entreprises et les consommateurs sans garantir la sécurité infaillible prévue.
Ou servent elles d’autres desseins ?
Sécurité et liberté : un équilibre précaire
Il est essentiel de trouver un équilibre entre la sécurité et la liberté, entre les coûts et les avantages.
L’UE a la lourde tâche de créer un modèle que d’autres régions peuvent suivre sans réserve. Cela implique une réflexion éthique poussée, prenant en compte que les choix faits aujourd’hui façonneront le futur du secteur financier non seulement en Europe mais dans le monde entier. Pour arriver à cet objectif, toutes les parties concernées doivent participer à ce débat qui mérite de devenir public in fine. Les citoyens européens ne devraient pas laisser leur avenir être débattu à huis clos par une poignée de technocrates politisés.
L’UE est à un carrefour
Les réglementations en cours ont des implications vastes et profondes qui nécessitent une introspection sérieuse.
Les libertés individuelles, si chères aux européens, ne doivent pas devenir une victime collatérale dans cette quête de sécurité permanente. Le défi ultime réside dans la création d’un environnement où la sécurité ne fait pas de l’ombre à la liberté. Seule la réalisation de cet équilibre permettra à l’Europe de présenter un modèle réglementaire durable et efficace.
Le droit à la vie privée est un droit précieux, et il est impératif qu’il ne devienne pas une victime collatérale de la soi-disant quête de sécurité.
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