L’idée d’une banque de détail fonctionnant comme un service public gratuit, soutenue par une partie de Français, semble être alimentée par une conjoncture économique particulièrement difficile. Elle peut également être aussi influencée par les médias eux-mêmes pour faciliter l’acceptation de cette idée.
En effet, la France, comme de nombreux autres pays, peine à gérer son déficit public, qui s’est considérablement aggravé après plusieurs crises économiques, sociales et sanitaires causées par une mauvaise gestion des gouvernements. Dans ce contexte de finances publiques sous tension, l’État cherche constamment des solutions pour réduire sa dette, notamment par l’augmentation des taxes en priorité, la réduction des dépenses avec parcimonie et la recherche de nouvelles sources de financement.
La dégradation de notre système économique global
Ce climat général de difficultés économiques renforce le sentiment d’injustice parmi les citoyens, qui constatent que les services essentiels, comme l’éducation, la santé et même les services bancaires deviennent de plus en plus coûteux, alors qu’ils sont indispensables au quotidien.
Face à cela, une question émerge : « Pourquoi la banque ne pourrait-elle pas, elle aussi, être considérée comme un service public, à l’image de l’école ou de l’hôpital ? » Quand on voit le résultat obtenu sur l’hôpital et l’école, on peut aussi se demander pourquoi certains se posent la question !
Mais continuons de voir où veut en venir Moneyvox qui a partagé une étude de YouGov France réalisée en août 2024 sur 1022 personnes.
La présence de l’État dans notre système bancaire actuel
L’accès à un compte bancaire, à des services financiers de base et à des moyens de paiement est aujourd’hui quasi obligatoire, ne serait-ce que pour percevoir son salaire ou régler ses factures. Dès lors, pourquoi ces services ne pourraient-ils pas être gratuits, ou du moins accessibles à tous, sans frais supplémentaires ?
Cette réflexion leur semble d’autant plus pertinente que l’État lui-même a, à plusieurs reprises, encadré ou régulé certains aspects du secteur bancaire pour limiter les excès ou assurer un minimum d’équité entre les citoyens.
Le droit au compte, instauré dès les années 1980, ou encore les plafonnements de frais bancaires pour les ménages en difficulté, illustrent cette volonté de protéger les usagers, sans pour autant bouleverser l’économie de marché qui régit le secteur.
Avant la privatisation des banques…
Par ailleurs, la privatisation progressive des banques françaises dans les années 1980 et 1990 a aussi marqué un tournant dans la manière dont les citoyens perçoivent ces institutions. Avant cette vague de privatisations, une grande partie des banques françaises étaient publiques et assuraient des missions d’intérêt général, ce qui ancre encore aujourd’hui l’idée, dans l’esprit collectif, que la banque devrait être au service des citoyens, et non l’inverse.
Si on reprend l’image de l’hôpital, est-il aujourd’hui plus au service du citoyen quand il refuse des non vaccinés ou quand il laisse mourir nos semblables aux urgences ? Quand il géré comme une entreprise devant faire des bénéfices ?
Mais la réalité économique est là
Cependant, cette proposition de retour à une banque de service public se heurte à la réalité économique. Le modèle de la banque en tant qu’institution commerciale, destinée à générer des profits, est profondément enraciné dans l’économie française et européenne.
Rappelons que la France dispose de 3 banques majeures dans le monde : BNP Paribas, SG et Crédit Agricole. Ces trois banques sont dans le TOP 20 des plus grandes banques dans le monde.
Nous avons déjà perdu beaucoup d’acteurs majeures de notre industrie (Alstom, Pechiney, Arcelor… plus récemment Doliprane), si nous perdons les banques, il ne restera pas grand-chose à notre économie déjà mise à mal par le fameux « quoi qu’il en coûte ! ».
Il semble peu probable que l’on revienne à une situation où les banques seraient entièrement publiques, d’autant que cela nécessiterait d’importants investissements de la part de l’État, qui doit déjà faire face à une dette colossale.
L’importance de la banque privée dans le système du crédit
En outre, la banque privée joue un rôle crucial dans l’octroi de crédit et la gestion des placements, des activités qu’un service public aurait du mal à absorber.
La banque publique : un débat stérile ?
L’idée d’un service public bancaire gratuit semble donc relever plus du souhait de voir les banques répondre à des critères d’équité et d’accessibilité, plutôt que d’une véritable alternative économique à la privatisation.
Ce débat pourrait d’ailleurs s’inscrire dans un cadre plus large de réformes économiques à venir, visant à réduire les inégalités entre les ménages dans l’accès aux services bancaires, en limitant les frais pour les plus modestes, tout en assurant que ces institutions continuent de fonctionner de manière efficace et rentable. Ce qui est déjà le cas normalement.
Au final, ce sondage traduit une frustration face à la perception d’une banque devenue trop « mercantile », mais il reflète aussi une aspiration à un modèle plus juste, où l’accès aux services financiers ne serait pas une question de pouvoir d’achat mais bien un droit fondamental.
Banque : la perception des Français selon YouGov
La banque de détail, avant tout un commerce destiné à générer des bénéfices, est perçue différemment par une partie des Français.
Selon un sondage exclusif, 68 % des participants estiment que les banques devraient fonctionner comme un service public gratuit. Cette opinion majoritaire soulève une question : un jour, le rôle du banquier pourrait-il revenir à celui de fonctionnaire ?
Le sondage mené par YouGov France auprès de plus de 1 000 adultes montre que les Français conservent cette vision d’un service public bancaire, malgré la nature commerciale des banques. Ce sentiment découle en partie de l’histoire, lorsque de nombreuses banques françaises étaient publiques après la Seconde Guerre mondiale, avant d’être privatisées dans les années 1980 et 1990. À cette époque, la banque de détail s’était largement intégrée au quotidien des Français, et l’ouverture de comptes se faisait sans frais, renforçant l’idée que ces services étaient accessibles à tous, sans coût direct.
Rappelons aussi que nous étions pendant « les 30 glorieuses », période de reconstruction et d’après-guerre.
Une dichotomie entre ce que les Français voudraient et la réalité
Aujourd’hui encore, malgré leur statut d’entreprises privées, les banques sont souvent perçues comme responsables de missions d’intérêt général, comme l’accès au compte bancaire ou aux distributeurs automatiques de billets, indispensables pour recevoir des salaires et gérer les dépenses courantes.
Cette ambiguïté persiste, alimentée par des interventions régulières de l’État, notamment pour garantir le droit au compte et limiter certains frais excessifs.
Le cas particulier de la Banque Postale
La situation particulière de La Banque Postale, encore détenue en grande partie par des fonds publics, illustre cette perception. Elle joue un rôle clé en fournissant des services bancaires de base, comme le Livret A, souvent perçus comme un droit pour tous les citoyens, renforçant ainsi l’idée d’un service public bancaire.
Les frais bancaires, qui ont fortement augmenté depuis les années 1990, sont une source majeure de mécontentement. Alors que les ménages aisés parviennent souvent à échapper à ces frais, les ménages plus modestes, eux, en souffrent davantage, ce qui alimente un sentiment d’injustice.
L’idée d’un retour à un secteur public bancaire, proposée par certains mouvements politiques, reste un débat. Bien que cela semble en accord avec les attentes d’une partie des Français, peu de mesures concrètes sont prises dans cette direction.
Toutefois, l’accès universel aux moyens de paiement pourrait être envisagé, mais un service public du crédit paraît plus difficile à instaurer.
Les banques publiques : les dangers de cette idée farfelue
Cette idée de transformer les banques en un service public comporte néanmoins des risques qui méritent d’être pris en considération.
En effet, une telle transformation aurait des conséquences profondes, non seulement sur le fonctionnement des banques, mais aussi sur les services rendus aux particuliers.
La mauvaise gestion du risque lié au crédit
L’un des premiers dangers réside dans la gestion des risques financiers. Les banques privées, de par leur nature commerciale, doivent maintenir une rentabilité pour survivre. Elles sont ainsi incitées à faire preuve de prudence dans l’octroi de crédits et la gestion des dépôts.
Si les banques étaient entièrement sous le contrôle de l’État, avec pour mission de servir gratuitement tous les citoyens, elles pourraient être tentées de prendre davantage de risques, notamment en prêtant à des particuliers ou des entreprises moins solvables, dans une logique d’inclusion à tout prix. Cela pourrait mener à une accumulation de créances douteuses, fragilisant ainsi le système bancaire tout entier. On se souvient encore des effets de la crise des Subprimes.
Une perte de qualité des services bancaires
De plus, un autre risque concerne la qualité et la diversité des services. En devenant un service public, les banques pourraient perdre en agilité et en capacité d’innovation. Actuellement, la concurrence pousse les établissements à améliorer leurs offres, que ce soit en matière de services numériques, de produits d’investissement ou de solutions de crédit. Si la banque devenait un monopole public, l’absence de concurrence pourrait entraîner une baisse de la qualité des services, car il n’y aurait plus d’incitation à innover ou à répondre aux attentes changeantes des clients.
Une perte de l’attractivité de la France
Enfin, il est important de souligner que la transformation des banques en services publics pourrait entraîner un désengagement des investisseurs privés et une raréfaction des financements disponibles pour les entreprises. En effet, les banques privées jouent un rôle clé dans le financement de l’économie, en octroyant des crédits aux entreprises pour soutenir leur développement. Si les banques devenaient publiques et offraient des services gratuits, les marges de manœuvre pour financer l’économie seraient limitées, ce qui pourrait avoir des répercussions négatives sur la croissance et l’emploi.
L’effondrement de notre système bancaire actuel et l’avènement d’un système centralisé entre les mains de l’État
Sans la concurrence bancaire, les banques n’auraient plus d’intérêt à être aussi nombreuses. Certaines disparaîtraient entrainant des licenciements, le chômage et donc l’appauvrissement encore des citoyens. Le système deviendrait donc centralisé entre les mains de l’État qui pourrait tout gérer et deviendrait omnipotent. Ne parlons même pas du lancement de l’euro numérique !
Les banques sont de véritables moteurs économiques pour notre pays. Et la concurrence est saine et stimulante.
Ainsi, bien que l’idée d’une banque publique gratuite puisse paraître attrayante pour certains et effrayante pour d’autres qui y voient le spectre d’un communisme 2.0, elle n’est pas encore d’actualité. Mais les médias ne nous y préparent-ils pas ?
Dans un contexte de difficultés économiques et de tensions sur le pouvoir d’achat, cette idée soulève des questions cruciales sur la viabilité du système bancaire, la gestion des risques, et la capacité à répondre aux besoins de l’économie. Avant d’envisager une telle transformation, il est essentiel de peser soigneusement ces enjeux.