La pandémie a lourdement impacté l’économie dans son ensemble. Des secteurs entiers ont été reconfigurés, comme le tourisme et l’industrie du spectacle. Mais qu’en est-il pour la banque ?
C’est un bilan de changements structurels lourds qui s’offre à nous, comme nous allons le découvrir dans cette actu.
Télétravail, flex office et digitalisation des services
La banque en Belgique
Petit détour en Belgique, où les agences bancaires ont pu poursuivre leur activité, sans grands problèmes, pendant la crise sanitaire et les confinements. Plutôt que de venir en agence, les clients ont rapidement pris l’habitude de prendre rendez-vous à distance.
- Chez KBC par exemple, 65% des salariés de la banque travaillent physiquement dans l’agence, tandis que 35% sont en télétravail.
- Selon les études réalisées par les banques belges, un pourcentage significatif des clients sont satisfaits des conseils qu’ils obtiennent de leur banque en RDV distanciel (80 à 90% selon le type d’offre sollicitée).
- ING va jusqu’à inscrire le principe du télétravail dans son fonctionnement structurel, avec la possibilité pour les employés de télétravailler à 50%.
Chaque banque s’adapte selon ses contraintes et sa flexibilité, mais une chose est sûre : un basculement des mentalités s’est opéré depuis le début de la pandémie. Le RDV en agence n’est plus un passage obligé et tant les clients que les banques s’adaptent au nouveau contexte.
Les habitudes en Suisse
En Suisse aussi, le télétravail est entré dans les mœurs : le géant UBS a autorisé en juin 2021 les deux tiers de ses 72.000 salariés à passer en télétravail partiel.
France : Comment les banques s’organisent ?
Et en France, quelle est la situation en comparaison à nos voisins européens ? Des négociations d’accords sur le télétravail ont été entamées en juin 2021, malgré les réticences historiques des banques françaises sur ce sujet.
Conséquence, le « flex office » semble s’imposer progressivement. Pour prendre un exemple, la Société Générale, a récemment inauguré de nouveaux locaux à Fontenay-sous-Bois, le bâtiment Sakura. Ce dernier peut accueillir 3.000 collaborateurs, dont 2.200 en flex office !
Du côté des clients, on constate une accélération de la digitalisation du parcours client. Certains établissements bancaires français ont vu la part d’accès à leurs services par le digital multiplié par deux !
Cette tendance à la digitalisation et au service à distance est vouée à se renforcer dans les années à venir, en parallèle des fermetures progressives d’agences bancaires, un peu partout dans le pays.
Des banques plus responsables ?
Moins de fraudes
Le télétravail, que nous venons d’évoquer, fait partie des avantages offrant une plus grande autonomie aux salariés, au quotidien.
Mais les banques opèrent sur un marché lourdement régulé et sensible, alors une question peut se poser : quel est l’impact du télétravail sur la fraude ?
Selon une étude réalisée par une banque londonienne, portant sur 162 traders basés à Londres, le fait de travailler à distance a permis de baisser de 7% la probabilité de commettre une fraude ! Des études à plus long-terme devront toutefois être menées pour déterminer l’impact sur la sécurité des services bancaires rendus, pour valider cette étude d’une portée restreinte.
Une prise de conscience environnementale
La pandémie a aussi été, pour de nombreuses personnes, l’occasion de se rendre compte qu’un changement de vie était possible. Aux Etats-Unis, on assiste par exemple à la « Grande Démission », avec un taux historiquement élevé de démissions de salariés.
Dans ce contexte de remise en cause de nos modes de vie, de nouvelles banques apparaissent, sur le sillon du développement durable. Citons, en France, les Fintech vertes comme Green Got, Onlyone ou helios. Leur promesse ? Tout d’abord, s’assurer que les fonds déposés par sa clientèle ne financeront pas les énergies fossiles. Et second point : financer des actions concrètes en lien avec la crise climatique.
De manière beaucoup moins anecdotique, lors de la récente COP 26 à Glasgow, plus de 450 banques mondiales, parmi les plus grandes, ont lancé une nouvelle initiative visant à décarboner progressivement leurs investissements.
Ces mêmes banques ont promis d’apporter des trillions de dollars d’investissements verts, d’ici 2050. Cette nouvelle très encourageante doit être nuancée : les banques ont historiquement lancé des initiatives qui n’ont pas été suivies d’effets concrets.
Reste donc à s’assurer, dans les années et décennies à venir, que ces engagements soient tenus !
Sécuriser les transactions, les fonds et les données : un enjeu crucial
Sur un autre sujet sensible, les banques investissent de plus en plus dans la cyber-sécurité, afin de garantir un niveau de sécurité des transactions et services bancaires accrus. Elles protègent ainsi l’argent de leur clientèle et leur propre réputation. En effet, un scandale lié à une faille de sécurité informatique est propre à endommager sérieusement la crédibilité d’une banque.
Quoi qu’il en soit, tous ces éléments pointent vers une responsabilisation croissante des banques. On peut même parler, non pas vraiment de démission de l’Etat mais de transmission d’une partie de ses responsabilités vers les banques. Les banques prennent en quelque sorte une mission du pouvoir politique en contrôlant les individus.
Secteur bancaire : un rôle sociétal de plus en plus important
Des banques qui agissent pour l’économie réelle
Pendant la pandémie, les banques françaises ont été mises à contribution pour littéralement sauver des milliers d’entreprises de la faillite. Notamment avec le Prêt Garanti par l’Etat, le fameux PGE. Le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel-CIC ont par exemple mobilisé 200 millions d’euros chacun, afin d’accompagner leurs clients, petites entreprises, à passer le cap.
Pour les banques traditionnelles françaises, l’épisode de la crise sanitaire a donc été l’opportunité de démontrer leur rôle important de soutien à l’économie réelle.
La psychologisation des relations clients<>banques
Ce rôle sociétal a également une face plus sombre, ou du moins qui peut davantage porter à débat : la psychologisation des relations entre les banques et leurs clients. La capacité pour un client d’accéder à ses comptes en ligne, de manière totalement autonome, peut aboutir à des situations personnelles catastrophiques.
Telle celle d’une jeune femme anglaise bipolaire, qui a dépensé (sans réellement s’en rendre compte) 28.000 livres, provenant d’une vente immobilière, en achats futiles. La banque a été mise en cause, et aurait, selon la plaignante, dû agir de manière préemptive pour prendre en compte l’état psychologique de sa cliente et la prémunir contre ses propres démons !
Certaines banques utilisent des outils, basés sur l’intelligence artificielle, destinés à décrypter l’état psychologique du client, sur base d’un scan facial. D’autres analysent finement, grâce à l’intelligence artificielle, nos comportements de dépenses, afin d’y repérer des tendances ou des actions inhabituelles. Attention aux dérives que cela peut apporter.
Aux côtés des banques, des applications de gestion de budget personnel, elles aussi s’appuyant sur l’intelligence artificielle, voient le jour. Certaines, comme Neymo, dépendent de grandes banques, d’autres sont indépendantes. Toutes ont cependant l’objectif de nous aider (ou de nous tenir fermement par la main, selon le point de vue) dans la gestion de nos finances au quotidien.
On peut aujourd’hui parler de « banque-nounou », et noter une infantilisation croissante des clients et citoyens que nous sommes. Dans ce secteur aussi, les individus perdent donc peu à peu leur liberté. Car sous l’égide de préserver notre sécurité, le citoyen est dépourvu de sa responsabilité, et donc de son libre arbitre, de ses choix et au final de sa liberté. Après les états, le secteur bancaire aussi se plie progressivement (à la fois sous la contrainte réglementaire et juridique) à ce mode de fonctionnement, en nous proposant des garde-fous, des « punitions » et récompenses… Et tout ceci de manière automatisée, grâce à la Big Data et aux algorithmes d’IA.