En mai, le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, accompagné du ministre délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises, Alain Griset, ont dévoilé les résultats de l’enquête réalisée par l’Observatoire du financement des entreprises (OFE). Celle-ci portait sur le bilan des services bancaires à destination des TPE et des PME. Voici les chiffres principaux, les axes d’améliorations possibles et nos conseils.
Les frais bancaires des entreprises sont bien plus élevés que ceux des particuliers
Pour dresser un bilan, l’Observatoire a réalisé ses travaux entre juillet 2020 et mars 2021. Cette approche est basée, notamment, sur l’analyse chiffrée du poids des frais bancaires sur les entreprises, dont les chiffres sont issus de la Fédération des Centres de Gestion Agréés ou FCGA. Le premier constat, ces frais représentent en moyenne 0,45% du Chiffre d’Affaires d’une entreprise sur une année.
Un écart en défaveur des entreprises
En s’appuyant sur les données comptables de la FCGA, l’Observatoire a révélé le coût moyen total prélevé par les banques en matière de comptes professionnels. En moyenne, celui-ci est inférieur à 1100€. Mais si on prend en considération, les frais de découvert, il grimpe à 1 700€ dont 1 037€ pour la gestion du compte et 650€ supplémentaires pour les intérêts ainsi que les divers frais de découvert.
En comparaison avec la facture bancaire des ménages français, celle des professionnels paraît salée. En effet, selon l’enquête réalisée annuellement par l’association nationale de consommateurs et usagers CLCV, en moyenne, les frais bancaires qui prélevés en 2021 sur les comptes appartenant aux particuliers s’élèvent entre 66 et 210€ selon le profil du client.
Plusieurs raisons peuvent justifier cet écart :
- Les plafonnements destinés aux clients particuliers,
- Le suivi généralement plus pointilleux des entreprises,
- Les obligations de surveillance plus importantes qui pèsent sur les banques.
Les frais bancaires diffèrent d’une banque à l’autre
L’importance de cet écart peut paraître étonnante étant donné l’hétérogénéité des tarifs d’une banque à l’autre. En effet, dans son rapport, l’OFE a analysé les plaquettes tarifaires de 11 établissements et a noté une différence importante entre les différents prix pratiqués sur les services bancaires à distance. Entre l’enseigne la moins chère et celle qui pratique des frais les plus élevés, cet écart atteint 163%.
Selon le ministère de l’Economie, qui s’est exprimé lors de la publication de ce bilan, il n’est pas simple de comparer les prix pratiqués à destination des pros. Les tarifs sont fortement personnalisés selon les profils et les besoins. De plus, les banques proposent souvent des services groupés à la carte. Pour le ministère de tutelle, cette disparité est un signe évident d’une forte pression concurrentielle.
Les caractéristiques des frais bancaires prélevés sur les TPE/PME
Les frais bancaires sont disparates d’une TPE/PME à une autre
Les frais prélevés par les banques varient également d’une entreprise à une autre :
- En 2019, 20% des entreprises ont dû s’acquitter de moins de 240€. En 2020, cette proportion a baissé de 5 points,
- Inversement, l’Observatoire a noté une nette progression de la proportion des TPE/PME dont le montant total des frais annuels dépasse 1 800€. Si en 2019, elles représentaient environ 14,9%, en 2020, elles étaient près de 17%.
Les frais bancaires conservent une proportion limitée
D’après le rapport de l’Observatoire, malgré le montant élevé des frais bancaires prélevés sur les comptes professionnels, le poids de ceux-ci reste limité par rapport aux chiffres d’affaires des TPE/PME :
- Selon les estimations réalisées par une banque à partir de données réelles, les frais bancaires représentent entre 0,3% à 2,4% des charges externes. La proportion varie selon les activités et les services bancaires souscrits,
- Une autre banque avance un ratio situé entre 0,1% et 0,3% du chiffre d’affaires,
- D’après les statistiques émanant de la FCGA, en moyenne, la proportion des frais prélevés par les banques représente 0,7% du chiffre d’affaires des entreprises concernées.
Dans ses conclusions, l’Observatoire encourage le développement des axes d’amélioration identifiés afin d’entretenir une bonne relation entre les entreprises et leurs partenaires financiers.
Notre ressenti sur la facture salée des frais bancaires pour les entreprises :
Une concurrence accrue
Ce constat n’est pas récent et si autant de Fintech se sont lancées et continuent à le faire, sur le segment des entreprises, c’est parce qu’il y a un fort potentiel. Le dernier acteur à se lancer dans le domaine est Hello bank! et sa formule Hello Business devrait faire du bruit.
Les politiques tarifaires, pour le public professionnel, sont souvent abusives. Nous pensons par exemple aux frais pour faire un virement hors de la zone euro. Non seulement cela coûte cher, parfois près de 100€ de frais pour un virement, même si celui-ci n’est que de 25€, et en plus la durée de la procédure est très longue. Aujourd’hui des acteurs comme Wise ont des services bien plus rapides et jusqu’à 5 fois mois chers.
Utiliser des services complémentaires pour réduire la facture
Le fait de se multibancariser pour les pro est fréquent. Ici cela permet vraiment de réduire la facture globale. Certains acteurs sont sans frais de tenue de compte. Très souvent il ne s’agit pas de banque, ni de néobanque mais juste de solution de paiement agrémentée de véritables outils de gestion administratif, comptable et parfois même juridique. Nous pensons ici à :
- Shine : pour les indépendants.
- Qonto : Fintech qui fait beaucoup parler d’elle, notamment grâce à sa collaboration récente avec October afin d’accorder des PGE.
- Blank : propulsée par le Crédit Agricole, cette startup récente a un bel avenir devant elle avec son offre complète à prix mini.
- ManagerOne : un forfait tarifaire unique à 29,90€ adapté à tous les types d’entreprises qui allie rapidité, efficacité et sécurité.
Croissance externe et rachats
Face à la montée en puissance de ces nouveaux acteurs, les banques traditionnelles s’organisent :
- Société Générale rachète Shine,
- Crédit Agricole participe au déploiement de Blank,
- Prismea est la Fintech de Crédit du Nord,
- ManagerOne est issu de l’association de la banque Wormser Frères avec une Fintech…
Le constat et les axes d’optimisation
La prise de conscience de Bruno Le Maire et Alain Griset
Cette enquête était attendue. Le ministre de l’Economie est satisfait de ce bilan qui permet de dresser un constat réel et chiffré. Il met en exergue également des points à améliorer au plus vite. De son côté Alain Griset se « réjouit » de cette étude qui lui semble être un signal positif entre l’amélioration du dialogue : professionnels et système bancaire.
Les évolutions possibles
- Continuer à renforcer et faciliter le dialogue entre d’un côté l’entreprise représentée par les dirigeants et les équipes qui gèrent les finances et de l’autre côté le système financier. Ceci peut se faire par l’instauration annuelle d’un rendez-vous pour dresser les besoins et le bilan.
- Augmenter les compétences financières des dirigeants des TPE-PME. Ceci peut passer par une campagne nationale orchestrée par la Banque de France avec des outils et des formations de mise à niveau.
- Faciliter la médiation bancaire pour résoudre les litiges plus simplement et rapidement.