La Fintech berlinoise, pionnière de la banque mobile est sous le joug d’un superviseur spécial envoyé par la BaFin. Pourquoi ? L’autorité allemande de contrôle des marchés financiers va procéder à la vérification de procédures internes de N26. Quel sera le verdict attendu ?
Pourquoi ce contrôle ?
La lutte anti-blanchiment et la lutte contre le financement du terrorisme sont au cœur de la préoccupation de la BaFin.
Une croissance fulgurante qui semble suspecte
Le nombre fulgurant de clients de N26 a mis la puce à l’oreille du régulateur. En seulement un an, la néobanque a embarqué plus de deux millions d’utilisateurs. Dans l’Hexagone, son volume de clientèle a fortement augmenté pour atteindre 1,75 million.
Pourquoi ces nouvelles Fintech ont-elles tant le vent en poupe ? Les frais réduits, la facilité d’ouverture du compte et sa rapidité, le fait de proposer des services novateurs … sont-ils les seules raisons ?
En savoir plus sur N26 pour y ouvrir un compte
Le gendarme du secteur bancaire se pose la question. Il a pris ce mardi 18 mai 2021 une décision rare : l’envoi d’un superviseur pour vérifier la mise en place des procédures anti-blanchiment. Jusque là, seul le géant bancaire Deutsche Bank avait dû se conformer à cette ordonnance. Selon le « Financial Times », la mission fut confiée à l’agence Mauzars, spécialisée en audit.
Des processus à renforcer
La BaFin attend que la licorne renforce ses processus de lutte contre le financement du terrorisme et de l’anti-blanchiment depuis deux ans. N26 affirme publiquement avoir « massivement avancé » dans l’installation de ces dispositifs, mais stipule que beaucoup d’efforts doivent être faits dans ce domaine. Il y a 3 ans, le régulateur avait souligné les lacunes de l’entreprise. En 2019, ce dernier avait encore soupçonné la Fintech de pratiques douteuses. Il ne se contente plus désormais de promesses verbales.
Les nouveaux acteurs sont très fréquemment contrôlés, mais pas de cette manière. Certains disent que ce type de contrôles « hardcore » devraient se multiplier et ce même envers les établissements classiques. Les licornes comme Revolut et donc N26 devraient prendre l’avantage grâce à une plus forte expérience.
Une introduction en bourse prévue pour bientôt
L’enjeu est important. N26 met tout en œuvre pour obtenir une licence de holding financière afin de se lancer vers une introduction en bourse d’ici 2023.
Cela ne l’effraie pas malgré le fait qu’en 2020, elle a affiché 110 millions de pertes nettes sur ses marchés européens majeurs. Avec 1500 employés, elle a été valorisée à 3,6 milliards de dollars lors de sa dernière levée il y a une année. Cela veut dire que N26 dispose de moyens conséquents pour ses projets internationaux. Pour elle, cette introduction en bourse est un moyen de s’élargir de manière exponentielle.
Des banques dans le même cas que N26
Au cas où des lacunes en matière de lutte anti-blanchiment sont observées, N26 peut être passible d’amende. Quelques banques aussi sont dans la même situation.
Les acteurs à risque
Ces nouveaux établissements se focalisent sur l’acquisition de clients d’une manière accélérée pour couvrir leur valorisation et leur modèle. Malgré les pertes, ces derniers sont souvent utilisés par des réseaux malveillants. Ceux-ci jouent sur les failles sur les justificatifs imposés et dans les conditions d’accès au compte pour leur basse besogne. Ce risque est bien identifié en France par l’Office central de répression de la grande délinquance financière.
En 2018, la néobanque britannique Revolut a également été victime de son succès. Elle avait dû signaler à son régulateur, la FCA, l’éventuelle présence d’opérations de blanchiment sur sa plateforme. Cette dernière avait conquis 2 millions de clients majoritairement anglais, mais aussi français. Selon le porte-parole de Revolut, leur activité a littéralement explosé en 2018. Cela est un véritable challenge en matière de conformité pour ce dernier qui a investi sur des segments assez risqués comme les cryptomonnaies.
Les risques encourus par N26
À l’instar de N26, la Banque Carrefour avec son compte C-Zam a aussi été la cible du gendarme financier. Après le contrôle, le régulateur y a détecté une douzaine de griefs en termes de lutte anti-blanchiment. Les Échos ont révélé vendredi dernier que la banque aurait à payer une amende de 1,5 million d’euros. Portant le compte C-Zam n’existe plus aujourd’hui. Au regard de cette gravité « des éléments d’atténuation, des manquements et des éléments d’aggravation », la décision stagnera pendant cinq ans dans le domaine public. N26 peut également payer cette même somme si des lacunes sont notées.
Par la suite, si ses mesures sont jugées trop légères, y ouvrir un compte ou le conserver risque d’être plus compliqué.