Vous aussi, vous laissez dormir l’argent sur votre compte courant ? Si oui, vous faites partie de la majorité car l’épargne accumulée sur les comptes bancaires des Français ne cesse de grossir. Amplifié par l’incertitude de la pandémie, le taux d’épargne a bondi de plus de 4 points sur un an (+130 milliards en 2020 d’après La Banque de France). Mais que font les banques de cet argent ? A quoi sert-il ? Levons le voile !
Non, vos dépôts ne dorment pas dans des coffres-forts
Faisons simple : vos dépôts servent aux activités de la banque. Lesquelles ? A prêter aux particuliers (crédit conso, crédit immobilier) et aux entreprises moyennant rémunération (les intérêts).
Base du système : l’argent circule
On dit souvent qu’on laisse dormir l’argent sur son compte bancaire. C’est vrai pour vous mais ce n’est pas vrai pour la banque. Elle utilise les fonds pour financer l’activité économique en prêtant aux divers acteurs contre le paiement d’intérêts. C’est son modèle économique (d’une manière très simplifiée).
Une banque a donc besoin de liquidités. Comment ? En puisant dans les dépôts ou en empruntant auprès d’autres banques ou des marchés financiers. Si l’argent ne circule pas, alors le système se grippe conduisant à une crise financière, puis économique et enfin sociale.
Le cas particulier des taux bas
Avec l’afflux de dépôts, l’épargne s’accumule sur les comptes bancaires. Parallèlement, la demande de crédits s’accroît moins vite, créant un déséquilibre, même si les encours de crédit restent plus élevés que les encours de dépôts. Bonne nouvelle pour les banques tous ces dépôts, non ? Et bien pas en ce moment.
Reprenons. Pour financer son activité, une banque se sert des dépôts de ses clients ou s’endette sur les marchés financiers. D’ordinaire, la première solution est la moins chère. Elle offre plus de marge. Mais, avec les taux bas, la banque gagne plus à s’endetter qu’en exploitant les dépôts des comptes bancaires non rémunérés. Un comble non ?
Taxer les dépôts pour stopper le cumul record de l’épargne
Vos dépôts brûlent les doigts des banques, qui seraient encore plus embêtées si leurs encours dépassaient les flux de crédits. Pourquoi ? Car les établissements bancaires devraient recaser cette manne financière sur les marchés…à perte à cause des taux négatifs.
D’où le coup de frein des banques sur l’accueil des dépôts des particuliers. Comment ? En taxant l’argent sur les comptes courants de leurs clients, comme c’est le cas dans des établissements européens et même français vis-à-vis des plus fortunés.
C’est pour cette raison, que certains acteurs comme :
- N26 taxe les dépôt de plus de 50 000€,
- La filiale française de la banque Suisse Lombard Odier taxe les dépôts de plus d’un million d’euros,
- UBS une banque Suisse taxe les dépôt de plus de 500 000€,
- En Allemagne, d’autres établissement ont aussi agit en ce sens.
En France, en janvier 2020, les institutions annonçaient s’orienter vers une autre solution. Plutôt que de taxer les dépôt, elles vont augmenter sensiblement tous les frais. Un moyen au final de toucher plus de monde et donc de gagner plus.
Peut-on choisir ce que nos dépôts financent ?
Pas encore. Les banques utilisent vos dépôts comme bon leur semble y compris pour financer des activités que vous n’approuvez pas. Cependant, l’heure est au changement. Depuis deux ans, les grandes banques subissent une pression pour sortir des investissements dit « polluants » comme le charbon et bien d’autres. C’est pour cette raison que BNP Paribas par exemple a dévoilé début 2020 un agenda sur 20 ans pour sortir de ces projets et s’orienter vers des investisements plus responsables.
BCE et gestion des dépôts : les réserves obligatoires
Toutes les banques possèdent un compte courant à la banque centrale européenne (BCE). Elles y placent des réserves de liquidités proportionnelles à leurs encours de dépôts. Avec un taux de réserve obligatoire de 1%, le prêt d’une banque de 100 000 € entraine un dépôt de 1000€ à la BCE.
C’est une sécurité et un instrument pour gérer la production de crédits. Baisser ce taux favorise le crédit. Exemple : avec un taux à 0,5%, la banque n’a plus qu’à déposer 500 € pour un prêt de 100 000 €. Elle dispose donc de plus de liquidités à prêter.
Inversement, augmenter le taux ralentit la production de crédit. Exemple : avec un taux à 2%, la banque doit geler 2000 €. Mais c’est une fraction des dépôts qui atterrit à la BCE, le reste est ventilé dans des prêts directs, produits titrisés et autres investissements spéculatifs.
Plus de transparence et de traçabilité : le cas helios
Des voix réclament plus de transparence autour du fléchage des dépôts. De ce constat est née la néobanque verte Hélios dont la ligne directrice consiste à ce que l’argent de ses clients soit utilisé pour financer des activités en faveur de la transition écologique.
N’étant pas une banque, Hélios n’héberge pas les dépôts qui sont placés chez SolarisBank. Cet adossement permet de créer des financements pour les entreprises de la transition à partir de 25% à 40% des dépôts.
Et le reste ? Les fonds constituent la fameuse réserve de liquidité mise en dépôt à la BCE. Cet argent est soustrait du bilan de SolarisBank qui ne peut donc pas financer des entreprises non compatibles avec les valeurs d’helios (charbon, chimie, élevage intensif, etc.).
Ce mécanisme dit de ringfencing offre donc une meilleure transparence sur l’utilisation des dépôts des clients de la néobanque verte. Ce n’est pas le cas du fonctionnement classique des comptes de cantonnement où tout est mélangé.
Traçabilité et transparence sont des attentes de plus en plus fortes des usagers bancaires. Une néobanque comme helios veut accompagner ce mouvement de responsabilisation des épargnants désireux de reprendre la main sur l’utilisation de leurs dépôts. Un défi auquel les innovations technologiques (blockchain, intelligence artificielle) pourraient s’avérer décisives.
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