Réserve fédérale en bitcoins (SBR) aux USA : coup de poker ou vision d’avenir ?

Publié le - Auteur Par Tony L. -
Réserve fédérale en bitcoins (SBR) aux USA : coup de poker ou vision d’avenir ?

Depuis quelque temps, l’idée d’une réserve stratégique de Bitcoin (SBR) défendue par Donald Trump attire l’attention du secteur, des économistes et politiques du monde entier. Le nouveau président élu et son entourage souhaitent que les États-Unis constituent un stock fédéral de bitcoins, de la même manière qu’ils disposent d’une réserve de pétrole pour faire face à des imprévus géopolitiques ou à des tensions sur les marchés. Cette proposition a déclenché un débat nourri dans les milieux politiques et financiers, tant elle interroge les fondements de la politique monétaire américaine et l’avenir du dollar.

Instabilité monétaire et finance décentralisée

Pour comprendre la portée d’une SBR, il est utile de rappeler que les cryptomonnaies ont connu une expansion remarquable ces dernières années. Après la crise financière de 2007-2008, une partie des investisseurs s’est tournée vers le nouveau né le Bitcoin, c’est-à-dire vers des systèmes de paiement décentralisés, jugés plus autonomes et moins vulnérables aux politiques monétaires traditionnelles. Et avec l’arrivée de nombreuses plateformes d’échange et de produits financiers adossés au Bitcoin, celui-ci a pris une place de plus en plus visible sur la scène économique mondiale.

Aujourd’hui, plusieurs élus républicains, dont la sénatrice Cynthia Lummis, soutiennent l’initiative d’une SBR car ils considèrent le Bitcoin comme un actif numérique limité par nature, susceptible d’offrir une protection contre l’inflation. D’autres élus, en revanche, doutent de la faisabilité d’un tel dispositif, d’autant plus que les lois actuelles imposent des verrous institutionnels. Pour commencer, le Congrès, tout comme le département du Trésor, devra donner son accord, ce qui n’a rien d’évident au vu des préoccupations sur la volatilité des cryptomonnaies et l’impact potentiel sur la stabilité du dollar.

Les spécificités d’une réserve fédérale de bitcoin

Le projet de SBR s’inspire directement de la réserve stratégique de pétrole. L’idée est de stocker une quantité déterminée de bitcoins pour anticiper divers risques économiques et financiers. Selon certaines estimations, la base d’un tel stock reposerait sur les quelque 207 000 bitcoins déjà détenus par les États-Unis à la suite de diverses saisies et actions judiciaires. Puis l’idée est que les États-Unis acquièrent ensuite 200 000 bitcoins par an pendant cinq ans. Notons que toute acquisition supplémentaire devra néanmoins être validée par la loi, puis négociée avec le département du Trésor, actuellement toujours réticent à l’idée de bouleverser les équilibres monétaires.

Pour ses défenseurs, la SBR offre deux avantages. D’abord, elle constituerait une réserve de richesse censée s’apprécier dans le temps, potentiellement utile pour alléger la dette nationale. Ensuite, elle donnerait à Washington un levier financier supplémentaire dans un monde où les cryptomonnaies jouent un rôle grandissant. Toutefois, cet argument repose sur l’hypothèse selon laquelle le Bitcoin conservera ou augmentera sa valeur sur le long terme. Sa volatilité élevée, illustrée par les fluctuations importantes de son cours ces dernières années, suscite également des doutes quant à sa fiabilité pour garantir la stabilité financière.

Quid de la place du dollar ?

Derrière l’enthousiasme pour une Strategic Bitcoin Reserve, certains experts perçoivent un risque de remise en cause du leadership mondial du dollar. Historiquement, la puissance américaine repose en bonne partie sur le statut de réserve internationale du billet vert, le « pétrodollar » ayant succédé à la parité or qui a structuré la seconde moitié du XXe siècle. Si le Bitcoin accède à un rôle de réserve reconnu par l’État fédéral, son adoption plus large dans le système financier international pourrait détourner l’attention (et la confiance) d’une partie des acteurs des marchés.

Toutefois, même si certains grands acteurs internationaux (BRICS) essaient de s’en passer en privilégiant des échanges dans leurs devises respectives, la remise en cause du dollar ne se fera pas du jour au lendemain. De nombreux États conservent des liens commerciaux et diplomatiques étroits avec les États-Unis, et de multiples échanges dans le monde restent libellés en dollars. L’inquiétude provient plutôt de la dynamique qui se dessinerait si les grandes puissances ou certaines économies émergentes commençaient à accumuler elles aussi des quantités importantes de bitcoins, alimentant ainsi une forme de compétition pour la détention de cette cryptomonnaie.

Une nouvelle forme de concurrence monétaire

La montée d’acteurs privés et décentralisés dans un secteur historiquement réservé aux banques centrales et aux institutions publiques est quelque chose de nouveau. De nombreuses plateformes d’échange crypto, des gestionnaires de fonds spécialisés et des entreprises détentrices de bitcoins disposent désormais d’une influence sur le marché. Cette réalité modifie les rapports de force traditionnels et oblige les États à repenser leur stratégie monétaire.

Si les États-Unis franchissent le pas, d’autres pays, conscients de l’enjeu, pourraient se positionner pour ne pas prendre de retard. Des rumeurs font déjà état d’achats de bitcoins par la Russie, la Chine ou encore le Japon, qui souhaiteraient renforcer leurs réserves en actifs numériques. Une concurrence monétaire inédite se profile donc, où la détention de bitcoins viendrait s’ajouter aux réserves d’or et aux devises fortes.

Imaginez que les États-Unis, une grande puissance économique comme la Chine, ou plusieurs grandes économies émergentes comme les pays des BRICS, commencent à acheter et à accumuler des blocs de bitcoins ou d’autres crypto-monnaies majeures. Cela pourrait déclencher une sorte de compétition mondiale, où chaque pays chercherait à augmenter rapidement ses propres réserves en cryptos pour ne pas rester à la traîne.

Au cœur de la volatilité

L’une des principales questions en suspens porte sur la volatilité du Bitcoin. Son cours a déjà connu des hausses rapides, suivies de baisses tout aussi marquées, ce qui rend délicat tout projet de réserve à vocation stratégique. Les fluctuations de valeur risqueraient de déstabiliser un pays qui en détiendrait une part significative, notamment si les mouvements de marché s’accentuent dans des contextes de crise. Les partisans du projet répondent que la volatilité finira par se réduire lorsque l’adoption de Bitcoin s’élargira. Néanmoins, l’histoire récente de la cryptosphère ne garantit pas de stabilisation à brève échéance.

Mais cette incertitude n’est pas un frein absolu : l’or a lui aussi traversé des périodes de volatilité par le passé, sans que cela n’empêche les banques centrales de le considérer comme un actif stratégique. Reste à savoir si le bitcoin pourra réellement jouer un rôle équivalent dans un cadre institutionnel, surtout si les législateurs demeurent divisés sur sa pertinence au regard de la politique monétaire.

Les évolutions possibles du cadre réglementaire

Pour que le SBR voit le jour à l’échelle fédérale, il faudra, comme évoqué ci-dessus, qu’un consensus se dégage au Congrès et que le département du Trésor accepte de négocier les termes d’une loi en ce sens. Par ailleurs, la régulation des cryptomonnaies continue d’avancer dans plusieurs États fédérés, parfois à des rythmes différents. Certains envisagent déjà la possibilité de constituer leurs propres réserves, tandis que d’autres durcissent les règles en prenant pour arguments la protection des consommateurs contre la fraude (États démocrates ?).

Si la Maison-Blanche souhaite vraiment instaurer cette SBR, un dialogue complexe devrait se mettre en place avec la Réserve fédérale et les agences de supervision financière. Tout projet de grande ampleur, qui touche à l’équilibre du dollar ou à la stabilité des marchés, fait l’objet d’auditions et de négociations techniques afin de limiter les répercussions imprévues sur l’économie américaine et mondiale.

Changements majeurs à l’horizon pour l’économie mondiale

Au-delà des États-Unis, l’intérêt de Washington pour une SBR envoie un signal fort : les cryptomonnaies sortent progressivement d’une position marginale et commencent à influencer les stratégies économiques des États. La scène internationale se retrouve alors face à un actif qui n’est ni émis ni contrôlé par une banque centrale, mais qui occupe un espace croissant dans le paysage financier et ceci est inédit à notre époque.

De fait, cette situation laisse entrevoir des opportunités pour l’innovation technologique, les services financiers et même la diplomatie économique. Les acteurs privés, qu’il s’agisse de plateformes d’échange, de concepteurs de solutions blockchain, ou d’entreprises du secteur, disposeront d’un rôle de plus en plus important dans l’organisation des flux monétaires, stimulant de nouveaux modèles d’affaires.

L’administration Trump lance un conseil consultatif sur les crypto-monnaies

Le président élu Donald Trump a récemment dévoilé un conseil consultatif dédié aux crypto-monnaies. Composé d’une vingtaine de PDG et fondateurs d’entreprises leaders dans la blockchain, ce conseil vise à apporter une expertise pointue sur les actifs numériques.

Les membres travailleront à élaborer des politiques favorisant l’innovation dans le domaine des crypto-monnaies, tout en clarifiant les réglementations. Le conseil contribuera à la rédaction d’une législation complète, abordant des sujets clés tels que la fiscalité, la protection des investisseurs et la lutte contre le blanchiment d’argent.

La création de la réserve nationale du Bitcoin est évidemment également au cœur des objectifs du conseil. Les membres devront plancher sur la mise en oeuvre de la fameuse SBR afin de renforcer le leadership des États-Unis en matière de gestion des actifs numériques.

Enfin, en coordination avec des agences gouvernementales comme la SEC, la CFTC et le département du Trésor, le conseil œuvrera à harmoniser les cadres réglementaires pour un environnement propice aux cryptomonnaies. L’administration Trump affiche clairement sa volonté de positionner les États-Unis comme un acteur de premier plan dans l’économie numérique mondiale.

« Ce conseil rassemblera les esprits les plus brillants des secteurs des cryptomonnaies et de la blockchain pour faire des États-Unis un leader mondial dans cette technologie d’avenir », a déclaré un haut responsable.

Connexe : Crypto : les gros acteurs font-ils peser un risque sur Bitcoin et sur le secteur en général ?


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Par Tony L.

Passionné de technologie, Tony vous propose des articles et des dossiers exclusifs dans lesquels il partage avec vous le fruit de ses réflexions et de ses investigations dans l'univers de la Blockchain, des Cryptos et de la Tech.

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