Crypto : les gros acteurs font-ils peser un risque sur le Bitcoin et sur le secteur en général ?

Publié le - Auteur Par Tony L. -
Crypto : les gros acteurs font-ils peser un risque sur le Bitcoin et sur le secteur en général ?

Les investissements massifs d’un acteur comme MicroStrategy peuvent apparaître comme préoccupants. En effet, MicroStrategy semble être pris d’une véritable fièvre acheteuse, l’entreprise dirigée par Michael Saylor a mis en place une stratégie d’acquisition de bitcoins à très grande échelle. Le total détenu par MicroStrategy s’élève actuellement à 446 400 bitcoins, soit près de 2% de l’offre en circulation, pour une valeur estimée à 43,7 milliards de dollars selon les informations communiquées par diverses sources, dont le site SaylorTracker. Si cette stratégie peut générer des perspectives de long terme pour certains, elle fait également peser des risques considérables sur le secteur dans la mesure où la société serait contrainte de revendre une partie de ses actifs.

Les raisons de l’accumulation massive de bitcoins

MicroStrategy, à travers les décisions de son PDG Michael Saylor, a fait le choix d’employer une part importante de ses ressources pour acquérir toujours plus de bitcoins. L’entreprise recourt notamment à des emprunts pour financer ces acquisitions. Les derniers achats recensés laissent entrevoir une montée régulière du nombre de bitcoins détenus. Cela s’explique, d’un côté, par la conviction défendue par l’entreprise que le Bitcoin constitue un actif porteur pour l’avenir. De l’autre, la stratégie s’appuie sur un schéma d’endettement : des notes convertibles ont été émises, et des investisseurs ont prêté des capitaux à MicroStrategy pour une période déterminée, souvent plusieurs années. Au terme de cette période, les prêteurs peuvent exiger de récupérer leur argent ou, à l’inverse, choisir l’option d’obtenir des actions de MicroStrategy si celles-ci sont jugées plus intéressantes sur le plan financier.

Ce recours à des financements extérieurs a permis à l’entreprise d’acheter un volume de bitcoins qui n’a cessé d’augmenter. Le coût moyen d’acquisition s’est lui aussi élevé, car chaque nouvel achat implique un investissement à un prix souvent supérieur au précédent. Tant que le cours du bitcoin se maintient à un niveau supérieur au prix de liquidation, la société peut continuer de conserver ses parts. Selon certains analystes, MicroStrategy aurait fixé ce seuil de liquidation à environ 16 000 dollars par bitcoin. Tant que le marché reste bien au-dessus de ce montant, l’entreprise ne semble pas en position de devoir vendre. En revanche, l’hypothèse d’une chute profonde du prix de la cryptomonnaie pourrait fragiliser cette stratégie.

Une stratégie d’endettement audacieuse

Plusieurs observateurs du secteur, notamment le youtubeur Paul Cryptoformation (@Paul_The way sur X), estiment que l’approche de MicroStrategy pourrait déboucher sur un événement négatif pour le marché des cryptomonnaies. La crainte réside principalement dans la possibilité d’une vente massive si la société se trouve dans l’incapacité de rembourser ses dettes ou si les détenteurs de notes convertibles exigent un retour sur investissement sous la forme de capitaux liquides plutôt que d’actions. Dans ce cas, l’entreprise n’aurait d’autre choix que de céder une partie de ses bitcoins afin de faire face à ses obligations financières. Un tel scénario risquerait alors de provoquer une offre subite de plusieurs centaines de milliers de bitcoins, avec un effet potentiellement impactant sur le cours global de l’actif et sur le marché crypto en répercussion.

La comparaison avec l’épisode Luna repose sur le fait qu’un acteur unique peut provoquer un effet domino lorsque sa position devient insoutenable. Si, dans une conjoncture baissière, MicroStrategy devait revendre d’urgence sa réserve, ce mouvement pourrait précipiter la baisse du prix de Bitcoin sur les plateformes d’échange. Le poids détenu par l’entreprise est loin d’être anodin : détenir 446 400 bitcoins en circulation correspond à un levier de pression non négligeable, surtout lorsque l’endettement se renforce. Cette inquiétude s’est accentuée avec la mise en place d’un fonds indiciel permettant de spéculer sur la valeur de MicroStrategy avec un levier multiplicateur. En période de marché haussier, cet effet amplifie les gains potentiels. Mais en cas de retournement brutal, l’effet inverse se produit, et les pertes se trouvent démultipliées.

Le rôle du fonds indiciel à effet multiplicateur

MicroStrategy, connue pour ses achats massifs de bitcoins, est également liée à un fonds indiciel à effet de levier x2 (ETF) permettant aux investisseurs de spéculer sur la hausse ou la baisse de son action. Lancé en septembre 2024, le T-Rex 2X Long MSTR Daily Target ETF (MSTU) offre une exposition longue avec un levier multipliant par deux les variations de l’action MicroStrategy. Cet outil vise à amplifier les rendements quotidiens, en reflétant les fluctuations du Bitcoin. Cependant, cette stratégie accroît la volatilité : si une dynamique haussière peut séduire les investisseurs, un retournement rapide du marché pourrait amplifier les pertes.

Les organismes de régulation ont autorisé la création de ce produit financier, parfois au moment où la valorisation de l’entreprise se trouvait proche d’un pic. Les investisseurs qui parient sur la hausse de l’action MicroStrategy avec effet de levier s’exposent à un risque supérieur à la normale. Si le titre se met à reculer, les positions peuvent se voir liquidées rapidement, ce qui accentuerait la tendance baissière. Dans un tel contexte, une dégringolade profonde du cours pourrait conduire l’entreprise à revoir sa stratégie de détention de bitcoins, voire à liquider une partie de ses actifs pour conserver un niveau de fonds propres acceptable.

L’effet des emprunts et des notes convertibles

Autre outil utilisé par MicroStrategy, les notes convertibles. L’entreprise a largement utilisé cette technique pour accumuler des capitaux. Ce type d’instrument présente un fonctionnement particulier, à savoir qu’un investisseur prête des fonds à l’entreprise, avec la perspective de convertir ultérieurement ce prêt en actions. Le moment venu, deux options se présentent : recevoir des actions ou exiger le remboursement du capital. Lorsque le cours de l’action est considéré comme avantageux, la conversion s’opère souvent. Cependant, si la valeur de l’action chute au point de devenir inférieure au montant initialement investi, de nombreux prêteurs préfèrent réclamer leurs fonds.

Dans un marché en pleine euphorie, la stratégie reposant sur l’endettement peut se révéler rentable, car le cours de Bitcoin peut progresser régulièrement et gonfler les réserves de la société. Le cours de l’action MicroStrategy en bénéficie donc automatiquement, ce qui attire encore plus d’investisseurs, et il s’installe un climat de confiance. À l’inverse, lorsque le marché se retourne et que la valeur de Bitcoin fléchit, l’entreprise se retrouve sous pression. La demande de remboursement des notes convertibles peut alors forcer MicroStrategy à liquider une partie de ses avoirs en bitcoins. Plusieurs scénarios semblables ont déjà été observés par le passé dans l’univers crypto, comme avec certaines plateformes qui empruntaient pour investir, puis subissaient les conséquences d’un retournement.

Le poids de ce type d’acteur sur le secteur crypto

L’importance prise par MicroStrategy dans la détention de bitcoins amène à se demander si ce phénomène constitue un atout ou un danger pour l’écosystème dans son ensemble. D’un côté, le fait qu’une entreprise publique investisse de tels montants peut contribuer à renforcer la notoriété du Bitcoin aux yeux des grands investisseurs. L’entrée d’acteurs institutionnels et privés de cette envergure peut encourager l’adoption, attirer un public plus large, voire alimenter un climat d’optimisme sur le long terme.

En revanche, cette concentration de bitcoins entre les mains d’un acteur unique est source de préoccupations. Certains craignent un déséquilibre du marché, dans la mesure où le volume détenu par MicroStrategy peut amplifier les mouvements à la hausse comme à la baisse. Les traders et les détenteurs individuels de bitcoins pourraient en subir les répercussions si un événement subit impose une importante liquidation des positions de l’entreprise. Il n’est pas idiot de considérer que cette posture pourrait se révéler risquée si l’entreprise s’obstine à vouloir augmenter son stock de bitcoins à l’infini, indépendamment du niveau de prix. Le Bitcoin, qui se présente normalement comme un actif décentralisé, peut en effet voir son prix temporairement influencé par une poignée de gros acteurs de ce type.

Au final, les grandes manœuvres de MicroStrategy autour du Bitcoin ont placé l’entreprise au cœur des discussions sur la solidité du marché. Avec 446 400 bitcoins, évalués à plus de 43 milliards de dollars, l’entreprise se situe à un niveau de détention rarement égalé par d’autres acteurs. Pour rappel, BlackRock, leader mondial de l’investissement, se positionne également comme un acteur clé dans l’acquisition de Bitcoin. Sous la direction de Larry Fink, l’entreprise a connu une accélération remarquable en 2024, surpassant la plupart de ses concurrents. Et son ETF Bitcoin détient déjà plus de 500 000 BTC, une somme colossale évaluée à environ 48 milliards de dollars.

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Par Tony L.

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