Mise en circulation, utilisation, contrôle, fin de la monnaie fiduciaire… Que va changer l’arrivée progressive des monnaies numériques de banques centrales (MNBC ou CBDC en anglais) dans notre quotidien ?
Confiance et stabilité ou contrôle et surveillance des paiements ? À quoi doit-on vraiment s’attendre avec l’arrivée de l’euro numérique ? Selon Vladis Dombrovskis, vice-président exécutif à la Commission européenne, « l’euro est une réussite européenne évidente : une monnaie mondiale de confiance qui symbolise notre force, notre unité et notre solidarité. Cependant, comme de plus en plus de gens choisissent de payer par voie numérique, l’euro devrait refléter l’ère numérique et s’y adapter ».
C’est ainsi que l’idée de création d’une monnaie numérique de banques centrales (MNBC), nommée Cash+, est née.
L’avènement de celle-ci est également une réponse aux cryptomonnaies qui sont de plus en plus utilisées et qui contrarient les autorités financières car elles échappent à leur contrôle.
Euro numérique : quand pourrait-il circuler et dans quel but ?
Selon deux rapports, une étude de marché et un « exercice de prototypage », la BCE a validé la faisabilité d’un euro numérique. Quand pourrait-il être instauré ?
Cash+ : vers une phase de préparation dès l’automne 2023 ?
Une révolution monétaire est en marche. Des essais de prototypes ont permis à la BCE de conclure qu’il est « possible d’intégrer en douceur » l’e-euro dans la gamme des méthodes de paiement déjà existante. Le Conseil des gouverneurs de la BCE doit ainsi décider à l’automne 2023, si une seconde phase « de préparation » sera mise en place.
Le 28 juin dernier, Bruxelles a présenté un cadre législatif pour Cash+, qui devrait devenir nouvelle monnaie légale en Europe d’ici à 2027. Son déploiement, qui n’est pas spécifiquement une atteinte citoyenne, mais suscite hostilité des banques et fantasmes, devrait cependant prendre bien plus de temps que cela.
MNBC / CBDC : quelle nécessité pour les autorités financières et politiques ?
D’après des experts, l’euro numérique est devenu une nécessité face à la dématérialisation croissante des paiements avec l’essor, notamment, de l’e-commerce. Objectif, favoriser l’inclusion financière et contrer la montée en puissance des crypto-monnaies, incontrôlables et volatiles.
Les banques centrales veulent de ce fait proposer une alternative, afin de faire face à la triple révolution numérique dans le secteur financier.
De leur côté, les États voient dans cette innovation financière, un moyen de protéger et renforcer leur souveraineté monétaire.
« Concrètement, les MNBC vont servir à faire circuler la monnaie numérique émise par la banque centrale via les nouvelles technologies », nous expliquait récemment Philippe Herlin, économiste et auteur, entre autres, du livre « Bitcoin, comprendre et investir » (Éd. Eyrolles). « Ces transferts de fonds rapides de longue distance et moins coûteux se caractérisent par des virements instantanés de smartphone à smartphone par exemple, sans RIB. Cela afin de répondre à la forte demande. »
Derrière ces enjeux de pouvoir, n’y a-t-il pas une ambition de contrôle et de surveillance des paiements ? Les citoyens sont-ils gagnants dans ce changement de paradigme où il n’est pas concerté.
Pourtant, avant de procéder à de tels changements fondamentaux dans une démocratie, normalement le Peuple a le droit de dire ce qu’il en pense. Il pourrait être consulté par referendum ? Pour ce faire, il doit également être bien informé.
Euro numérique : vers une surveillance généralisée ?
En passant à 100 % par des systèmes informatiques, l’euro numérique pourrait être tracé et surveillé. Signe-t-il la fin de la monnaie fiduciaire et le début d’une monnaie programmable ?
Cash+ : « Un certain degré de contrôle des paiements »
Christine Lagarde, présidente de la BCE, l’a affirmé : l’euro numérique Cash+ permettra « un certain degré de contrôle des paiements ». « Un mécanisme sans contrôle » devrait néanmoins être mis en place « pour des montants très faibles, autour de 300 ou 400 euros », tient-elle à rassurer.
Il est par ailleurs important de noter que cette devise électronique, qui aura cours légal dans les 20 pays ayant adopté l’euro, ne devrait être qu’une option de paiement supplémentaire, en complément des espèces. « Un euro numérique serait juste un autre moyen de paiement en euros, la monnaie unique de la zone euro », note la BCE sur son site, afin de tenter de faire taire la rumeur grandissante de la disparition de l’argent liquide. Stocké sur une carte ou un téléphone mobile, il proposera également une fonctionnalité de paiement hors ligne, afin de préserver l’anonymat. Mais, seulement « jusqu’à un certain degré, pas au niveau de la Banque centrale européenne », a précisé Christine Lagarde.
D’après une version du projet de réglementation consultée par l’AFP, les particuliers, les très petites entreprises et certaines associations à but non lucratif pourront se réserver le droit de refuser de recevoir l’euro numérique en paiement.
Pensons également à ce scandale récent au UK avec la fermeture du compte bancaire de Nigel Farage pour des raisons d’ordre politique, des millions de citoyens sont également concernés paraît-il, … on voit pointer une forme de crédit social où le citoyen doit se conformer à ce qui est dit.
MNBC : comment obtenir des e-euros ?
Pour obtenir et utiliser des e-euros, dont le paiement sera gratuit, il faudra se rapprocher de sa banque ou d’un fournisseur de service de paiement. Si ce dernier fait faillite, l’utilisateur ne sera en revanche pas impacté. Il sera de ce fait plus sûr, en théorie, d’avoir des e-euros plutôt que des euros sur son compte bancaire.
D’autres organismes (autorités locales, bureau de poste, plateformes de cryptomonnaie …) pourraient aussi être désignés par les États-membres, pour distribuer et ouvrir des comptes en e-euros.
Par ailleurs, comme le stipule le texte de la Commission, la BCE « développera des instruments pour limiter l’utilisation de l’euro numérique comme réserve de valeur ». Selon la présidente, les comptes des particuliers en euros numériques seraient ainsi limités à 3 000 euros. « Mais si ce plafond est déjà atteint et que vous recevez de l’argent, le virement sera-t-il bloqué ? Ou alors vous faudra-t-il rapidement transformer une partie de vos euros numériques en euros classiques ? », s’interroge Philippe Herlin.
De nombreux points restent encore flous. L’expert estime que « les banques centrales poursuivent un projet d’une tout autre ampleur : les MNBC deviendront l’unique forme de monnaie », afin de « pouvoir tracer l’ensemble des transactions », avec la disparition progressive du cash. Autre possibilité, qui devrait survenir plus tard, la programmation de la monnaie « pour lutter contre le terrorisme, bien sûr, imposer la transition énergétique, appliquer un taux d’intérêt négatif pour forcer à consommer et à relancer l’économie. »