Le jour du mardi 26 juillet est à marquer d’une pierre blanche pour les Franco-américains. Les députés français ont dénoncé l’extraterritorialité américaine qui leur impose de payer des impôts aux Etats-Unis. Ces parlementaires ont approuvé un amendement symbolique contre le gré du gouvernement. Cela aurait pu être une bonne nouvelle, si le Sénat n’avait pas fait fi de l’article 10 ter issu de l’amendement adopté à l’Assemblée Nationale. Au final, la joie aura été de courte durée. Regardons ce qu’il faut retenir de cet échec pour les américains accidentels.
FATCA : Quels sont les faits concernant les Franco-américains ?
Depuis plusieurs années, la complexité du système de fiscalité imposé par les Etats-Unis entraîne de nombreux problèmes pour les Américains accidentels.
Rappel : Qui sont les Américains accidentels ?
Pour mémo, sont considérés comme Américains accidentels :
- Les personnes qui ont une double nationalité, à savoir, une nationalité américaine et une autre d’un Etat membre de l’Union européenne,
- Elles ont obtenu leur double nationalité à la naissance soit parce qu’elles sont nées sur le sol américain, soit parce que l’un ou les deux parents sont de nationalité américaine,
- Ces binationaux résident hors des États-Unis. Ils peuvent avoir quitté le territoire américain durant leur enfance. Dans certains cas, ils n’y ont jamais travaillé. Ils peuvent également n’y avoir aucune résidence permanente après leur majorité.
Autrement dit, les Américains accidentels sont ceux qui, malgré eux, détiennent une nationalité américaine. Et pourtant, ils n’en ont jamais tiré profit.
Selon le franco-américain Fabien Lehagre à la tête de l’Association des Américains accidentels, ils sont aujourd’hui plus de 40 000 citoyens Français à n’avoir qu’un très faible degré de rattachement aux États-Unis.
Quelles sont les obligations des Américains accidentels ?
Les Américains accidentels sont considérés comme des citoyens américains à part entière. D’ailleurs, ils sont reconnus comme des contribuables aux Etats-Unis. Par conséquent, ces binationaux doivent se plier au FATCA ou Foreign Account Tax Compliance Act et au CBT ou Citizenship-based taxation. Ces réglementations extraterritoriales s’appliquent ainsi aux Franco-américains depuis 2013. Ces derniers sont alors tenus à des obligations fiscales envers ce pays.
En France en particulier, ces lois entrainent des effets néfastes pour les Américains accidentels. Outre le fait d’être doublement imposés, ils ont par exemple un choix très limité en termes d’établissements bancaires. La plupart d’entre eux leur refusent l’ouverture d’un compte en raison des coûts très élevés entraînés par les différentes procédures. Certains produits bancaires (prêts immobiliers, placements financiers, assurances vie…) leur sont également refusés. Les banques appliquent ce type de traitement alors qu’il s’agit d’une infraction avec le droit français et européen.
Les conséquences pour les Américains accidentels
Pour eux c’est la débâcle : ils se doivent se débattre avec l’Ambassade pour obtenir un numéro d’identification fiscale américain à fournir à leur banque. Pour ceux qui ne maitrisent pas bien la langue ils doivent faire appel à un avocat pour remplir leur déclaration, ce qui a un coût. Ils sont aussi victimes de rejets de la part des banques comme précédemment expliqué.
Certains préfèrent renoncer à leur seconde nationalité, mais là encore c’est compliqué : l’opération coûte 2 350$ et n’exonère pas des obligations déclaratives.
Les députés français veulent agir en faveur des Américains accidentels
Face à cette situation jugée épouvantable pour les Franco-américains, les députés ont décidé d’agir.
Un amendement pour exiger l’application réciproque des transferts de données
Pour dénoncer la double-imposition exigée aux citoyens français qui détiennent également une nationalité américaine, le député du parti « Les Républicains » Olivier Marleix a déposé un amendement. Le texte vise à imposer une condition au transfert des données des Franco-américains vers les Etats-Unis. En clair, le parlementaire appelle à ce qu’il soit appliqué de manière réciproque aux citoyens français résidants aux Etats-Unis.
C’est qui était prévu à l’origine sans être appliqué par les États-Unis. À la base il s’agissait d’identifier les riches contribuables américains cachant leur argent sur des comptes offshores afin de les inciter à rapatrier leurs avoirs. Ce qui n’est plus le cas et pèse sur les finances des personnes « lambdas », en effet 40 000 citoyens français sont concernés.
Ce qui aurait pu être un grand pas pour les Franco-américains
Le débat a provoqué d’intenses prises de position à l’encontre de l’extraterritorialité américaine. Si 182 députés ont voté contre, le texte a finalement été approuvé par 237 voix, et ce, contre l’avis du gouvernement. Certes, l’amendement n’a aucune portée juridique. D’ailleurs, il ne produira aucun effet sur les conventions internationales. Cependant, il est extrêmement symbolique.
Pour l’Association des Américains accidentels dirigée par Fabien Lehagre, la date du 26 juillet aurait pu être un grand jour. Sur LinkedIn, ce dernier s’est félicité de ce grand pas en avant malgré tout. Selon lui, il s’agit pour les Franco-américains d’une réelle avancée pour faire front aux conséquences préjudiciables de l’extraterritorialité des lois américaines. Pour les députés, la question concerne la souveraineté de la France.
S’il s’agit d’un premier geste pour les Américains accidentels, ce n’est pas encore gagné. Le Sénat a mis un stop au projet. Pourtant ce combat ne date pas d’hier, en 2018 une résolution été adoptée à l’unanimité au Sénat afin que le gouvernement français mette en oeuvre une action diplomatique auprès des Etats-Unis afin d’obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels ». Le but était de leur permettre soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d’être exonérés d’obligations fiscales américaines. La même année au Parlement Européen une résolution est adoptée ainsi qu’un rapport parlementaire de 2019 sur l’assujettissement à la fiscalité américaine des Français nés aux États-Unis, et pourtant rien ne s’est produit.
La nouvelle présidence Américaine devrait permettre de relancer le débat.